Adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, la levée du secret médical en cas de violences conjugales continue d’animer de vifs débats. Ses défenseurs mettent en avant la relation de confiance entre le médecin et son patient: « Il faut s’en servir et permettre aux professionnels de signaler les sévices. »
Intervention de Maître Pierre Farge pour la Chaine BFM TV.
La levée du secret médical en cas des violences conjugales est-elle une entorse nécessaire au code de déontologie des médecins ? L’avocat pénaliste Pierre Farge est en tout cas convaincu du bien fondé de la proposition de loi LaREM adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 29 janvier dernier. « Lever le secret médical permettra de sauver des vies« , assure-t-il.
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Malgré ces interrogations « légitimes », Me Pierre Farge ne croit pas à “l’effet pervers” de cette mesure. La dérogation au secret médical en cas de violences conjugales viendrait s’ajouter à celles qui existent déjà dans la loi concernant les mineurs et les personnes vulnérables. Or, « la levée du secret médical dans ces deux conditions n’a jamais empêché d’aller voir un médecin. L’argument de la perte de confiance ne tient donc pas dans le cas des violences sur mineurs, et il n’y a pas de raison qu’il s’applique aux violences conjugales« , estime l’avocat, également président du collectif Avocat-stop-féminicide.org, interrogé par BFMTV.com.
Et de poursuivre: « Les femmes violentées sont dévalorisées, elles n’osent pas décrocher leur téléphone, le médecin est souvent la seule personne à qui elles peuvent se fier. Il faut justement se servir de cette confiance en permettant aux médecins de rapporter les témoignages de violences conjugales à la justice. »
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Alors que seules 2 femmes sur 10 osent porter plainte et que 80% de ces procédures ont été classées sans suite, selon un rapport de l’inspection générale de la justice publié en novembre et portant sur les homicides ou tentatives d’homicides conjugaux en 2015 et 2016, Me Pierre Farge veut croire que « si c’est le médecin qui en réfère directement au procureur, la parole de la victime aura plus de poids et sera davantage prise au sérieux ».
En pleine navette parlementaire, la proposition de loi doit désormais être examinée par le Sénat avant d’être à nouveau soumise au vote des députés, ouvrant ainsi la voie à une évolution juridique « nécessaire », conclut Me Pierre Farge.
Propos recueillis par Ambre Lepoivre pour BFM TV.